Mes seins, ma décision

Ce matin, vers 10h, le Monde a mis en ligne un article qui se demande « Pourquoi les Françaises n’allaitent pas aussi longtemps que le préconise l’OMS ». Enfin, non, ça c’est le titre de 11h30, au début, c’était (et l’url en atteste) : « Pourquoi les Françaises n’allaitent pas assez longtemps »….
Un joli titre bien culpabilisant, saletés de françaises même pas foutues d’allaiter leurs mignons bébés. Pour aller bosser sûrement…  Z’ont dû se faire twittengueuler par des féministes, (longtemps par rapport à quelle norme ?) z’ont changé le titre.

Le titre en papier c’est : « Quatre bébés sur cinq ne sont plus allaités à 6 mois ».

pourquoi

Une étude publiée dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire de l’institut de veille sanitaire (je mets pas toutes les majuscules, tu complètes…et en plus j’ai mis aucun lien… ) sert de base à cet article. Une étude qui analyse et identifie les raisons de l’arrêt à tel ou tel moment de l’allaitement parce que « La promotion d’un allaitement plus long nécessite de mieux connaître les facteurs sanitaires, sociaux, démographiques ou encore culturels liés à la durée d’allaitement. ». Ou alors « cibler les profils des mères qui allaitent le moins longtemps afin de pouvoir aider les médecins à les soutenir ».
On aurait pu, avec les mêmes chiffre, identifier les raisons qui font que les femmes n’arrêtent pas l’allaitement, pour « cibler » celles qui ont besoin de soutien pour supporter les contraintes qui vont avec. On aurait pu…
Pourquoi faudrait promouvoir un allaitement plus long ? Ou enquiquiner les femmes qui veulent pas allaiter longtemps ? Ou pas allaiter du tout ?

Parce que l’organisation mondiale de la santé  « recommande ainsi un allaitement maternel exclusif jusqu’à l’âge de six mois, puis un allaitement partiel jusqu’à l’âge de 2 ans ».
Et l’article de détailler les avantages de l’allaitement maternel : Ce mode d’alimentation limite le risque d’infection gastro-intestinale du bébé, assure l’institution internationale, qui voit là le « moyen idéal d’apporter aux nourrissons tous les nutriments dont ils ont besoin pour grandir et se développer en bonne santé ».
Oups, non, en fait, l’article ne détaille rien. Un truc bidon : l’allaitement maternel est le moyen idéal d’apporter des nutriments qu’on trouve ailleurs aussi. Pourquoi donc le moyen idéal ? Grat, grat, grat (bruit de mes ongles grattant interrogativement mon crâne). Des idées ? On pourrait chercher du côté du patriarcat, genre « pendant qu’elles allaitent deux ans, ils dorment tranquilles, pas de concurrence sur le marché du rare taf et pendant qu’elles sont à la maison, autant qu’elles fassent le ménage).

Et un argument pseudo scientifique (« limite le risque d’infection gastro-intestinale du bébé ») repris, entre autres, sur le site de l’OMS, site qui affirme que :
Le lait maternel est le premier aliment naturel pour les nourrissons: (certes, certes, écolo même : 0 gaz à effet de serre, 0 consommation d’énergie fossile)  il fournit toutes les calories et les nutriments dont l’enfant a besoin pendant les premiers mois de la vie et continue de couvrir la moitié ou plus des besoins nutritionnels pendant le second semestre de vie, et jusqu’à un tiers de ces besoins pendant la deuxième année. (oui, on sait, il fournit tous les trucs nécessaires que les enfants au biberon trouvent ailleurs).

Il favorise le développement sensoriel et cognitif et protège le nourrisson contre les maladies infectieuses et chroniques. L’allaitement exclusif au sein diminue la mortalité infantile imputable aux maladies courantes de l’enfance, comme les diarrhées ou les pneumonies, et il accélère la guérison en cas de maladie.

Là j’ai flippé. Et puis je me suis rassurée. Pour la partie infectieuse, c’est le contraire. L’allaitement est pas meilleur contre les infections et tout et tout, c’est le biberon chez les pauvres qui est dangereux et la FAO (organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) l’explique très bien :
Il est pratiquement impossible de fournir une alimentation propre, stérile, à un enfant nourri au biberon dans les conditions suivantes:
Quand l’approvisionnement en eau de la famille provient d’une rigole ou d’un puits contaminés par des excréments humains (peu de foyers sont approvisionnés en eau courante saine dans les pays en développement);
Quand l’hygiène du ménage est mauvaise et que l’environnement domestique est contaminé par des mouches et des excréments;
Quand il n’y a pas de système de réfrigération ou autre lieu d’entreposage sûr pour conserver le lait maternisé ou le lait de vache;
Quand il n’y a pas de fourneau et qu’à chaque fois on doit ramasser du bois et allumer un feu pour faire bouillir l’eau pour stériliser le biberon;
– Quand il n’y a pas d’équipement adapté au nettoyage du biberon entre les repas, ou quand le biberon n’est qu’une bouteille en plastique fendue ou une bouteille de soda que l’on peut à peine nettoyer;

Donc, y’a une autre solution que la promotion de l’allaitement maternel, la fourniture d’eau potable et financièrement accessible à tous les humains, avec l’accès à un mode de cuisson sûr et économique, voire écologique et à un placard qui ferme.

Quid du développement sensoriel et cognitif favorisé par l’allaitement maternel ? L‘Inserm, institut national de la santé et de la recherche médicale dit que oui, c’est un tout petit petit petit petit peu mieux : La différence, en faveur des enfants allaités, est de 6,2 points sur 300 pour le développement psychomoteur à trois ans, et de 3,7 mots prononcés en plus à deux ans (sur 100). « A cet âge, les filles d’EDEN prononcent en moyenne neuf mots de plus que les garçons. Il s’agit donc d’une différence modeste, plus faible que celle observée entre les deux sexes » précise la chercheuse. « De même, elle est plus faible que celle observée entre les enfants dont les parents lisent une histoire tous les jours et les autres. Néanmoins, ces résultats sont significatifs et suggèrent que l’allaitement est l’un des nombreux facteurs qui peuvent expliquer les différences de développement cognitif entre les enfants » selon elle (l’étude de l’Inserm). Et si c’était pas à cause de la composition du lait maternel mais parce que les mères causent aux bébés en les allaitant ?

Il contribue à la santé (forcément, ça oblige la mère a pas ou peu fumé, consommé de l’alcool ou du café) et au bien-être des mères (parce que, pendant ce temps, personne leur explique qu’elles devraient allaiter ?) aide à espacer les naissances (y’a aussi la pilule, le stérilet, le préservatif, les relations homosexuelles, les relations non fécondantes, l’abstinence…), réduit le risque de cancer ovarien ou mammaire (les trucs sur le sujet sont peu passionnants, mais il semble qu’allaiter au moins 6 mois soit protecteur, on sait pas vraiment pourquoi), augmente les ressources de la famille et du pays. . Aaaaaah… pour la famille, je dirais bien qu’il diminue les dépenses de lait maternisé (ce qui est une économie, pas une augmentation de ressources). Pour le pays, grat grat grat. T’as une idée ?

Comme d’habitude pour les trucs de femmes, les avis normatifs de savants et autres experts (je féminise pas, c’est exprès) abondent, les conseils et les pressions. Y’a le bon comportement (facile à reconnaître : il alimente le patriarcat, l’aliénation) et le mauvais comportement (facile itou : il favorise la liberté des femmes).  Évidemment qu’individuellement, tous les choix sont valables, faut seulement être conscientes des enjeux. Et pas se laisser avoir.